Quelles sont les difficultés des artistes indépendants Coréens ?

Salutations cher kickers, et bonne année !

J'espère que 2022 a bien commencé pour vous tous. On attaque l'année avec un nouvel article qui va mettre la lumière sur les difficultés que rencontrent les musiciens en Corée du Sud. Vous me direz qu'une ribambelle de reportages plus ou moins qualitatifs traite de la question, et vous n'auriez pas tort. C'est pourquoi aujourd'hui il n'est pas question d'idol et de groupes de K-Pop qui vendent des millions de CD, mais d'artistes indépendant et/ou hors de l'industrie KPpop. Car après tout, ils existent aussi ! Pour se faire, on va partir à la rencontre de Sindosi, un band coréen super talentueux qui a accepté de répondre à mes questions sur le sujet ! Commençons par une présentation du groupe, et on verra ensuite ce qu'ils peuvent nous apprendre via leurs réponses.

Qui sont Sindosi ?

Comme dit il y a peu, Sindosi ou New Town de leur nom anglais, est un band Sud-Coréen né en 2018 de l'union de trois amis de toujours. C'est après plusieurs projets musicaux que les membres se décident à former un groupe.

Ces trois amis que vous voyez sur cette photo, répondent aux noms de Jaedong qui a créé une académie de musique, Sunghoon qui est psychologue clinicien et Beondu qui dit s'être adonné à différents jobs pour gagner sa vie. Leur premier EP s'intitule 'A Devout Person' et sort en 2020. Le groupe propose un style très rock et assez amical. J'entend par "amical" qu'on ressent aisément à travers leurs morceaux qu'ils sont la création d'amis proches qui cherchent la même chose. Je vous laisse en juger par vous même.

Personnellement j'aime beaucoup leur style et c'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai voulu travailler avec eux. En octobre 2021, ils ont révélé leur second EP, 'Open the pod bay door' tout aussi qualitatif et agréable à écouter que le premier. Là encore, on ressent la chaleur de la bande de copains à travers leur schansons, et surtout à travers le MV de 'Transform'.

Quand je leur ai proposé un interview, ils ont immédiatement accepté et en plus d'avoir répondu à toutes mes questions, ils ont pris le temps de tourner une petite vidéo rien que pour nous ! La voici :

La vidéo vous est traduite en français par Séverine, fondatrice de l'association HANSAMO qui est centrée sur la Corée du Sud. Pour les remercier, n'hésitez pas à les suivre sur Facebook et Instagram, c'est très intéressant ! Les membres y abordent déjà plusieurs points intéressants qu'on verra plus tard. En attendant, penchons nous sur l'interview !

L'Interview avec Sindosi

Dans un premier temps, je vous propose de lire la Q&A pour que vous puissiez lire directement leur réponses, et après nous verrons ce que l'on peut tirer comme conclusion.

Questions - Réponses

1) Êtes-vous complétement indépendants ou êtes-vous aidés par une quelconque agence ?

Sunghoon : "Nous somme indépendants à 100%. Aucune agence ne prête attention à un groupe local de punk-rock. Mais c'est cool, on s'en sort bien et on est heureux."

Jaedong : "Être indépendant aide pour faire de la musique. Mais pourtant nous sommes limités dans nos promotions lorsqu'on en a besoin. Nous nous occupons de nos promotions, de nos productions, et de la promo de nos performances nous mêmes. Bondu et Sunghoon sont particulièrement bons pour ce qui est de la production vidéo. J'aime ces situations car c'est vraiment amusant comme ça."

Bondu : "Je suis d'accord avec Jaedong. C'est génial de n'avoir aucune interférence de la part d'autrui. Tout de même, des fois j'ai l'impression que nous aurions bien besoin d'aide... Mais comme j'ai une longue expérience de 'DIY' dans la musique, j'ai beaucoup de savoir-faire." 2) Quelles sont les choses qui ont rendu difficile le fait de débuter ? Bondu : "Quand j'ai voulu (re)débuter, l'ambiance de la scène locale n'était plus la même qu'avant... La musique des band indépendants est sur le déclin. Dans le marché de la musique, le gap entre les 'riches' et les 'pauvres' est titanesque. Nous devons être prêt à tout miser sur de petites opportunités."

Jaedong : "Sindosi avait performé pour la première fois dans un club local qui existait depuis plus de 20 ans. Ce club, c'est un peu notre maison. La difficulté pour moi c'est que je dois sortir pour tenir des performances les samedis soirs, mais j'ai besoin de la permission de ma femme."

Sunghoon : "Rien de très spécial. Comme tout le monde, nous avons des limites de temps, d'énergie, de santé... Après notre journée de travail et notre rôle à la maison (Jaedong et moi sommes mariés et avons chacun un fils) il est quasiment 22h lorsque que nous pouvons nous concentrer sur la musique. J'essaie de faire le choses pas à pas en gardant un bon cœur"

3) Comment financez vous la production de vos albums et leurs distributions sur les plateformes de streaming ?

Sunghoon : "Nous devons tous économiser pour ça. On gagne un peu d'argent avec nos performances, et nous essayons d'obtenir du financement de la part d'un bureau gouvernemental. Heureusement, nos deux EP ont gagné des concours qui nous permettent d'obtenir un financement de la part de la mairie. Mais nous sommes aussi contrains d'utiliser notre propre argent des fois."

Jaedong : "Le projet de soutien de productions d'albums du gouvernement a de bons et de moins bons côtés. Je ne sais pas si le gouvernement a énormément d'argent, mais ils payent un peu les band peu populaires pour qu'ils puissent créer des albums. Une ou deux fois c'est cool, mais c'est affligeant que la musique indie ne puisse pas survivre par elle même. Aussi, j'ai la haine contre tous ces groupes qui n'aiment pas vraiment la musique mais qui veulent juste en récolter les lauriers. Il y a deux types de musiciens. Mais peu importe, nous avons gagné ces concours et on a pu gagner un peu d'argent grâce à ça, deux fois."

Bondu : "Je trouve que c'est nul de recevoir de l'argent du gouvernement. Mais produire un album coûte un sacré paquet d'argent... J'ai bon espoir qu'un jour nos revenus de musiciens puissent couvrir les coûts de nos productions. Ce que beaucoup de gens ne savent pas, c'est que distribuer sa musique sur des plateformes de streaming ne coûte pas d'argent hahaha !"

4) A l'heure actuelle, qu'elle est la plus grande difficulté pour vous dans le monde de la musique ?

Bondu : "Je ne suis plus un rookie qui a 20 ans... Je devrais être déterminé a quitter cette merde à tout moment. Trouver l'équilibre entre ma vie professionnelle, personnelle et artistique c'est super difficile."

Jaedong : "Pour moi, il n'y a aucune difficulté dans le monde de la musique. Je kiffe juste faire de la musique, performer, et découvrir de nouvelle situations inattendues. C'est presque la seule chose qui me permet d'échapper à la réalité pour un moment. Je suis juste satisfait de gueuler en chantant, de jouer de ma bass et faire le con sur scène."

Sunghoon : "L'extinction de la "vraie musique hindi" et le fait qu'il y ait de moins en moins d'endroits où en jouer. Nous sommes de plus en plus seuls au monde. Des fois j'ai l'impression d'être une bête en voie d'extinction. Même Hongdae* ne peut plus vraiment être une solution. L'énergie créative s'y perd et il n'y a plus que le capitalisme qui compte. Alors nous nous tournons d'avantage vers l'étranger... Par exemple le Japon, l'Indonésie, ET LA FRANCE ! S'il vous plaît, appelez nous !! "

*Hongdae est un quartier de Séoul, historiquement connu pour accueillir de nombreuses représentations d'arts de rue et de performances par des groupes et artistes indépendant.

Que peut-on en retenir ?

Grâces à leurs réponses et à la vidéo qu'ils ont tourné pour nous, on peut en apprendre beaucoup sur l'ambiance de la scène indépendante en Corée et sur les difficultés qui s'y rapportent. Le premier point intéressant, mentionné dans la vidéo, est le fait que c'est très dur de réussir à côté du mastodonte qu'est l'industrie K-Pop. Et ça se comprend... Vous vous imaginez devoir "survivre" avec deux de vos copains face à des agences comme SM, YG ou encore Hybe qui font des pieds et des mains pour garder le monopole du marché ? Cela soulève beaucoup de problématiques qui sont apparues en même temps que la K-Pop, et peut-être qu'on y consacrera un article prochainement... Car il y a pleins de choses à dire là dessus ! On parlera d'ailleurs à la fin de cet article des manières dont vous pouvez soutenir les artistes indépendant ou impopulaires.

Le second point, c'est le manque d'attention de la part des agences. Comme nous le dit Sunghoon, quelle agence voudraient dépenser de l'argent pour un groupe qui risque de ne pas être rentable ? L'amour de la musique vous dites ? Il faut croire que tout le monde ne voit pas le problème du même œil. Et ce problème en soulève d'ailleurs un autre... Le capitalisme est maintenant une partie intégrante du monde musical. Il n'est plus ou presque plus question de produire un artiste pour ses idées, sot talent, son innovation... Ce qu'on veut, ce sont des artistes qui rentrent dans les clous et qui vont rapporter gros. Quitte à omettre de produire des gens talentueux, il faut qu'ils soient rentables avant tout ! Et après tout, qui d'autre que ce râleur de Noya pour souligner les défauts d'un "vocaliste" ?

Ce qu'on peut principalement retenir, c'est que la musique indépendante en Corée semble se mourir, et qu'il y a plusieurs fautifs... Mais plutôt que les citer ici et de rallonger artificiellement cet article, on se garde ça dans un coin de la tête et on en reparlera prochainement dans un écrit dédié !

Comment sauver la musique indépendante ?

Avant de conclure, j'ai à cœur de parler un peu avec vous de la manière nous pouvons venir en aide à tous ces artistes qui se tuent à la tâche et qui souffrent de la dureté de cette industrie... Il y a moult moyen d'être d'une aide précieuse, et ce sans dépenser une piécette !

Soyez curieux

Le premier conseil que je peux vous donner si vous souhaitez participer à cette mission sauvetage, c'est bien d'être curieux, friand de découverte ! La musique indé est un monde GI-GAN-TESQUE ! Vous trouverez forcément votre bonheur quelque part. Pour découvrir ces artistes, je vous suggère de suivre des chaînes comme 1theK, Genie Music, Stone Music ou encore ma favorite, Poclanos. Vous y verrez de nombreuses chansons être publiées tous les jours. Ce sont des chansons qui pour beaucoup n'atteignent même pas un demi-millier d'écoutes, alors qu'elles mériteraient le million. Et je vous partage ma chanson préférée en exemple :

Partagez tout ce qui vous plaît

Cela peut apparaitre comme une évidence, mais beaucoup n'ont pas le réflexe de partager une œuvre qu'ils ont apprécié. N'hésitez pas ! Dès que vous aimez une chanson, un artiste, une performance, partagez, parlez-en. En deux clics, vous pouvez peut-être aider votre artiste préféré à hauteur d'une ou deux centaines de vues... N'est-ce pas fabuleux ? Et qui sait, peut-être qu'un effet papillon sorti de nul part pourrait toucher un million de personnes ?

Et évidemment, vous pouvez suivre ces artistes sur les réseaux pour leur donner de l'importance, acheter leurs album si vous le pouvez et le voulez, streamez leurs chansons, likez les, et plus important encore, parlez leur. Envoyez leur des messages, expliquez leur à quel point vous aimez leur travail. Comme l'a dit Jaedong, plus important que l'argent... Il y a l'amour ! L'amour que vous portez aux créations de vos artistes favoris, et même aux vôtres ! En cumulant tout ça sur le long terme, je suis convaincu qu'on peut agir en faveur de ce bel univers qu'est celui de la musique indépendante.

Sur ce, je vous remercie sincèrement d'avoir lu cet article. J'espère que vous me pardonnerez d'avoir été un poil sarcastique par moment et d'avoir d'avantage parlé avec mon cœur de mélomane sur cette dernière partie. Je vous invite très fortement à suivre Sindosi sur instagram et sur youtube. Encore un immense merci à eux pour avoir été si réactifs, j'espère qu'ils vous plaisent et qu'on pourra les aider par cet article à accroitre leur popularité. Je vous retrouve très prochainement pour un nouvel article... On va parler Survival, et on aura avec nous quelqu'un qui connait bien cet univers, et qui veut nous partager son expérience... Mais je ne vous en dis pas plus ! D'ici là je vous souhaite comme d'habitude de vous porter au mieux, et vous dis à bientôt !